Cannes 2024 : le palmarès
Greta Gerwig et son jury ont donc décidé de couronner ANORA de Sean Baker d’une Palme d’Or, la prime à un cinéma libre, énergique, qui, selon la présidente, les a fait rire et leur a brisé le cœur. Avec ANORA, Baker était pour la deuxième fois en compétition après RED ROCKET en 2022. Sa comédie dramatique qui suit les tribulations d’une strip-teaseuse qui se marie avec le fils d’un oligarque russe, avait ravi les festivaliers et la presse.
Pour le Grand Prix, qui couronne le plus souvent les propositions les plus audacieuses et / ou prometteuses, le jury a célébré ALL WE IMAGINE AS LIGHT, de la jeune cinéaste Payal Kapadia, premier film indien en compétition depuis trente ans.
Conséquence de la Palme décernée à ANORA, la grande surprise aura donc été de voir Mohammad Rasoulof couronné d’un Prix spécial du Jury en forme de lot de consolation, alors qu’il était depuis la veille l’un des favoris à la Palme pour LES GRAINES DU FIGUIER SAUVAGE, film très engagé, diatribe contre le régime iranien et toutes les théocraties, qui lui vaut aujourd’hui d’être en exil. Avant de le lui décerner, la cinéaste libanaise membre du jury Nadine Labaki a souligné l’importance politique du film, dans le contexte mondial : « Il n’est pas normal de rester normal quand des enfants meurent sous les bombes. » Mohammad Rasoulof, lui, en a profité pour rappeler la situation tragique de son pays : « Nombre de mes techniciens sont retenus en Iran et sous la pression des autorités. Je suis triste par la catastrophe que vit mon peuple au quotidien. Le peuple iranien vit sous un régime totalitaire qui l’a pris en otage. »
Le palmarès 2024 confirme par ailleurs cette tendance récurrente et absurde d’attribuer le Prix du scénario à des réalisatrices pour des films de mise en scène : après Lynne Ramsay pour A BEAUTIFUL DAY et Céline Sciamma pour PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU, c’est cette année au tour de Coralie Fargeat pour THE SUBSTANCE, qui, ironie du sort, dénonce par l’extrême ce que le patriarcat impose aux femmes.
Mais la grande déconvenue de ce palmarès reste l’absence incompréhensible d’Andrea Arnold qui, avec le splendide BIRD, a su affirmer son cinéma tout en le menant ailleurs.
Ci-dessous, le palmarès complet :
Palme d’Or
ANORA de Sean Baker
Grand Prix
ALL WE IMAGINE AS LIGHT de Payal Kapadia
Prix du jury
EMILIA PEREZ de Jacques Audiard
Prix de la mise en scène
Miguel Gomes pour GRAND TOUR
Prix spécial du jury
LES GRAINES DU FIGUIER SAUVAGE de Mohammad Rasoulof
Prix d’interprétation masculine
Jesse Plemons pour KINDS OF KINDNESS
Prix d’interprétation féminine
Karla Sofía Gascón, Zoe Saldana, Selena Gomez et Adriana Paz pour EMILIA PEREZ
Prix du scénario
Coralie Fargeat pour THE SUBSTANCE
Caméra d’Or
ARMAND de Halfdan Ullmann Tøndel