VOYAGE AVEC MON PÈRE
Si vous avez l’impression que VOYAGE AVEC MON PÈRE fait double emploi avec A REAL PAIN, ce n’est pas tout à fait vrai. Bien sûr, il s’agit aussi ici d’accomplir son voyage mémoriel vers les camps pour mieux résoudre le présent. Mais le ton est ici assez sinistre, loin des espiègleries du film de Jesse Eisenberg. Tout est tendu dans VOYAGE AVEC MON PÈRE, peut-être parce que c’est ce qu’incarne Lena Dunham : le conflit générationnel. Pour elle, journaliste de 36 ans, visiter la terre de son père, l’appartement où il a grandi, Auschwitz, c’est être une bonne citoyenne et une bonne fille dans un sens performatif. Obsédée par le bon parcours, au bon moment, par le rendement de ce grand voyage d’une vie, elle craque quand son père, fraîchement débarqué à l’aéroport avec du retard, papillonne et socialise. Pourtant intelligente, elle ne comprend pas pourquoi il renâcle à prendre un train pour le camp de concentration. De cette incommunicabilité entre les deux, qui se joue parfaitement dans ce face-à-face entre Dunham, l’Américaine au caractère bien trempé, et Stephen Fry, l’Anglais flegmatique, ressort la double injustice vécue par cette génération terrassée par la Shoah : pour que la société n’oublie jamais et que les jeunes apprennent, les rescapés doivent sans cesse se rappeler. Le film, fauché, en fait la démonstration brillamment mais en force, avec un scénario retors et en faisant grise mine.
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Réalisateur : Julia von Heinz
Avec : Lena Dunham, Stephen Fry, Zbigniew Zamachowski, Tomasz Wlosok
Pays : Allemagne / États-Unis
Durée : 1h52