HIT MAN

La comédie classique a toujours fait du mensonge son meilleur allié. Mais peu de films parviennent à en faire un vrai sujet. C’est peut-être parce qu’il est adapté d’une histoire vraie que HIT MAN prend le faux autant au sérieux. Car il faut la voir pour croire à cette histoire de timide professeur de philo qui joue les indics pour la police. D’autant plus que la police elle-même joue avec le faux puisqu’elle piège des aspirants meurtriers en leur présentant un tueur à gages bidon. Un jour, Gary se retrouve à enfiler le costume. Mais il prend le rôle très au sérieux. Point de départ déjà hautement réjouissant. Mais Richard Linklater et Glen Powell au scénario ont l’intelligence de pousser la situation plus loin, très loin. Héritier spirituel du merveilleux CŒUR PRIS AU PIÈGE de Preston Sturges (1941), grand film sur l’amour comme fiction, HIT MAN met constamment en abyme le jeu dans le jeu et fait du mensonge le carburant incontrôlable du polar qui, tout naturellement, vrille et dérape dans tous les genres. Finement écrit, le film jubile avec son héros et s’emballe dans un imbroglio dont nous devenons les complices. Car plus qu’un polar, HIT MAN est surtout une comédie romantique. C’est-à-dire un film sur les sentiments, ses dévoilements et tout ce qu’ils déclenchent. Au jeu dangereux que joue le héros s’ajoute le jeu de l’amour et du hasard qui prend ici une tournure détonante. Gary la menace devient par l’imbrication des mises en scène dans la mise en scène un objet de fantasme. Les mensonges s’accumulent, le faux prend toute la place et Richard Linklater de filmer tout ça avec l’ironie et l’énergie des meilleurs films des frères Coen. Et qui mieux que Glen Powell, récemment adoubé « It Boy » de Hollywood pour jouer cet Arlequin paumé entre toutes ses identités ? De presque tous les plans, il transforme HIT MAN en une leçon de comédie, enfilant perruques et costumes improbables, prenant des accents cartoonesques et des postures burlesques. Le génie du film, c’est de mettre au fond sur un même pied l’acteur et le personnage, la menace et le fantasme. En devenant un objet de séduction, l’acteur enfile un autre costume. Malin, le film tisse cette double lecture méta sans jamais perdre le fun ni le récit de vue. Comme les meilleures comédies classiques, HIT MAN raconte des choses profondes avec la plus grande légèreté. Et si on trouvait le plus grand bonheur dans la vie qu’on s’invente ? Et si mentir, c’était oser être soi-même ? Pourquoi aime-t-on autant qu’on nous raconte des histoires ? Tout ça avec des guns, des gags et des sentiments. Irrésistible, on vous dit.

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