THE FALL GUY

Sur le papier, THE FALL GUY, adaptation d’une série dont ne nous restent que quelques souvenirs d’enfance de dimanche terne, n’avait pas grand-chose pour lui. L’HOMME QUI TOMBE À PIC en VF racontait les aventures de Colt Seavers, cascadeur chasseur de primes (sic !) qui utilisait ses talents pour attraper des criminels. À l’arrivée, THE FALL GUY c’est ça, mais en mieux. Car l’intelligence de l’adaptation, c’est d’avoir fait quasiment table rase de la série et d’avoir pensé surtout ce pitch suranné comme un tremplin pour fabriquer une comédie à la fois d’action, romantique, policière et méta. Un quatre-en-un périlleux qui tient miraculeusement en équilibre, glissant d’un genre et d’une tonalité à l’autre avec pas mal d’agilité. Et David Leitch, ancien cascadeur devenu réalisateur et Drew Pearce, scénariste notamment du IRON MAN 3 de Shane Blake, peuvent appuyer leurs ambitions sur un casting parfait, d’Aaron Taylor-Johnson (toujours prêt à jouer limite second degré) à Hannah Waddingham, avec évidemment au centre, le couple qu’il faut, Emily Blunt et Ryan Gosling. Deux vraies stars au charme dingue certes, mais aussi, et surtout, deux stradivarius de comédie qui ravivent à l’écran l’alchimie de la screwball comedy en jouant ces ex-amants contrariés qui doivent cohabiter, malgré eux, sur le tournage d’un blockbuster. À la suite d’une cascade ratée, Colt a raccroché. Mais la star qu’il double tourne un gros film et on le supplie de venir aider la réalisatrice qui n’est autre que son ex-fiancée. Très vite quelque chose cloche sur le tournage et Colt se retrouve embarqué dans une étrange affaire criminelle. Tissant avec une grande habileté un mélange de scènes d’action, d’ironie méta sur les coulisses d’Hollywood et de comédie amoureuse (Ryan Gosling pleurant sur « All Too Well » de Taylor Swift, Emily Blunt utilisant le plateau pour régler ses comptes), THE FALL GUY réussit la prouesse d’être du cinéma connivent qui ne franchit jamais la ligne rouge du cynisme. Grâce notamment aux talents burlesques de Gosling, déjà à l’œuvre dans le génial THE NICE GUYS auquel on pense beaucoup, THE FALL GUY est un film constamment physique qui remet de la présence à l’écran là où le cinéma d’aujourd’hui se noie dans le numérique. On jubile devant sa générosité et les multiples trouvailles et rebonds d’une écriture qui connaît bien ses classiques, avec en prime une façon de nous rendre complice des artifices d’Hollywood. Un tour de magie qui révélerait ses trucs pour mieux nous en mettre plein la vue.