LE CLAN DES BÊTES

22/04/2025 - Par Aurélien Allin
La violence des pères, la bêtise des fils, la toxicité des hommes : pour son premier film, l’anglais Christopher Andrews fait montre de rigueur et d’assurance.

Après un court prologue qui projette sans préavis le spectateur au cœur d’une situation dramatique dont il ne connaîtra tous les tenants et aboutissants que plus tard, LE CLAN DES BÊTES développe une structure narrative en deux grandes parties, chacune consacrée à un point de vue spécifique sur la même intrigue. Michael (Christopher Abbott), berger irlandais au passé violent, vit seul avec un père impotent, violent et irascible (Colm Meaney). Après que deux de leurs béliers manquent à l’appel dans les hauts pâturages, il en vient à soupçonner leur voisin, Gary (Paul Ready), et potentiellement le fils de celui-ci, Jack (Barry Keoghan). De conjectures, Michael passe ensuite aux accusations puis aux poings et la situation s’envenime alors rapidement entre les deux clans, nourrie par de vieilles rancœurs et d’immuables constructions sociales. Deux parties, deux points de vue – celui de Michael tout d’abord, celui de Jack ensuite : le schéma n’est pas neuf mais pour son premier long-métrage, l’Anglais Christopher Andrews l’utilise avec une grande maîtrise et une évidente maturité. Intelligente mais jamais roublarde, son écriture engage immédiatement le spectateur auprès de Michael, et en fait un allié presque inébranlable, alors même que son passé et son comportement indiquent qu’il est des plus faillibles. Cela tient peut-être à l’interprétation ténébreuse mais fragile de Christopher Abbott, décidément un acteur passionnant, ou à la manière dont Andrews le regarde avec justesse, sans le dédouaner ni le juger. Quoi qu’il en soit, LE CLAN DES BÊTES nous projette dans ses bottes avec une facilité déconcertante, jusqu’à ce que la première partie se conclue sur un sommet d’horreur. Écran noir. Retour au début. Ce que l’on prenait pour acquis – Jack est un vaurien qui mériterait bien une leçon –, Christopher Andrews le déconstruit avec brio, là encore sans fourberie. Il ne détricote jamais ce qu’il a bâti mais y apporte un autre éclairage et le lot de nuances qui l’accompagne. Jack, ce qu’il traverse, le poids qui l’écrase, apparaît alors comme un écho à Michael. Tous deux englués dans leurs fautes et leurs erreurs, tous deux victimes de la violence de leurs pères, de cette masculinité toxique érigée en seul modèle possible. Émerge pourtant de cette atmosphère délétère une grande humanité, ultime dualité de ce film tout en contrastes, évoluant au grand air mais sous une chape de plomb étouffante, à la fois calme et tempétueux, cérébral et viscéral. Et pour Christopher Andrews, des débuts aussi humbles que tonitruants.

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Sortie : 23.04.25
Réalisateur : Christopher Andrews
Avec : Christopher Abbott, Barry Keoghan, Colm Meaney, Paul Ready
Pays : Irlande / Grande-Bretagne
Durée : 1h46
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