TOGETHER

Peut-on surmonter un incident déclencheur dénué de toute crédibilité ? D’aucuns diraient qu’un film d’horreur n’a pas à s’embarrasser de plausibilité mais comment croire qu’une personne dotée d’instinct de survie ou d’un minimum de jugeotte boira l’eau croupie d’une flaque découverte au fond d’une grotte insalubre ? Pourtant, c’est bien ce que font Tim et Millie, couple en crise de TOGETHER. En conséquence, ils vont lentement fusionner physiquement. Lui est un musicien raté, elle une institutrice dévouée et pour donner une nouvelle chance à leur amour, ils déménagent à la campagne, dans une jolie petite maison. Si TOGETHER ne souffre jamais de l’incident déclencheur négligé précité, c’est qu’il propose par ailleurs une expérience de body horror extrêmement convaincante. Non content de multiplier les visions d’horreur particulièrement sordides – Tim est assailli de cauchemars sur la mort, tragique, de ses parents –, TOGETHER bâtit patiemment son récit. Il fonde le fantastique dans des ressorts dramaturgiques humains crédibles, explorant la vie de ce couple davantage usé par les rêves puérils de Tim que par la routine. Couple à la ville, Dave Franco et Alison Brie insufflent une grande crédibilité à Tim et Millie, à l’amour qui les lie et aux problèmes qui les hantent. Si bien que lorsque survient l’horreur, TOGETHER fait mal, très mal, puisqu’il s’en prend à l’intégrité de ces personnages faillibles qu’il est parvenu à rendre attachants. Leurs peaux se mettent à coller au toucher, petit inconfort cocasse. Puis scène après scène, le scénariste et réalisateur Michael Shanks invente des situations toujours plus dérangeantes voire franchement cradingues dans lesquelles il est impossible de ne pas se projeter, jusqu’au passage obligé d’un coït qui dégénère – on vous laisse imaginer. TOGETHER n’est jamais aussi efficace, radical et pertinent que dans cette horreur physique et quotidienne, où la fusion des corps de Tim et Millie vient interroger et analyser leurs sentiments et l’intimité absolue, mystérieuse, que représente de partager sa vie avec un être aimé. Lorsqu’il plaque à son dispositif une intrigue mystique et des références à la théorie de l’âme sœur par Platon, TOGETHER se perd un peu et trivialise sa poésie violente et organique. D’autant que, dans son dernier tiers, on finit par perdre de vue ce qu’il souhaite vraiment raconter : TOGETHER se veut-il métaphore de la convergence des âmes dans l’amour ou allégorie des genres ? En se dispersant ainsi, le film perd un peu de sa force. Mais subsiste pourtant toujours l’écho de ses puissantes images doloristes.