ONE TO ONE : JOHN & YOKO

08/10/2025 - Par Aurélien Allin
A-t-on besoin d’un énième film documentaire sur les Beatles ? Quand ils sont aussi exceptionnels et pertinents pour l’époque que celui-là : bien évidemment.

« Fin 1971, John Lennon et Yoko Ono quittent Londres et emménagent à New York. Pendant 18 mois, ils partagèrent un petit appartement à Greenwich Village, rencontrèrent des artistes et des radicaux politiques et regardèrent beaucoup la télé. Cette période transformatrice de leur vie engendra le concert One To One, l’unique concert complet de John Lennon après la séparation des Beatles. » Le nouveau documentaire musical de Kevin Macdonald s’ouvre sur ce carton informatif, l’un de ses très rares élans de pur didactisme. Au contraire de MARLEY et WHITNEY, Macdonald n’use pas ici d’une forme conventionnelle constituée d’archives, de voix off et d’interviews. Avec ONE TO ONE, il utilise principalement deux types d’images. D’un côté, le concert donné le 30 août 1972, superbement restauré. De l’autre, une foule d’archives issues de la télé américaine (pubs, reportages, émissions, etc.) telles que Lennon et Ono les ont sans doute vues sur leur petit poste en 1972. Les extraits du concert fascinent. Les archives télé tout autant, qu’il s’agisse du Sonny & Cher Comedy Hour ou d’un reportage sur la révolte de la prison d’Attica. Cette juxtaposition sculpte le contexte social et politique de l’époque. L’ambiance de 1972. Mais au-delà, que veut dire et raconter Macdonald avec ce collage d’avant-garde ? Il tire tout d’abord le portrait touchant de Lennon et Ono comme personnalités réellement engagées. Jamais il ne cache ce que leurs idéaux, idées et actions ont parfois de naïf. Mais leur sincérité ne fait aucun doute et rappelle, s’il le fallait encore, tout ce que la musique du Beatle avait de viscéralement humain. En regardant 1972 par le prisme de ses programmes télé, Macdonald dresse aussi un panorama de l’Amérique et du monde d’alors qui, peu à peu, apparaissent similaires, voire identiques, à 2025. Avec le concert One to One en chœur antique – « Hound Dog » sur des images de Nixon en campagne, il fallait oser ! –, Macdonald raconte le racisme, les guerres et leurs avalanches de morts innocents, l’aliénation des sociétés modernes, l’altérité et le lien social contrariés par le capitalisme, les divisions et les rhétoriques fallacieuses. Une « ambiance mortifère ». Sans jamais recontextualiser ses images, ses histoires et leurs personnages, ONE TO ONE ne perd pourtant jamais en clarté ou en impact car les échos de ces archives résonnent si puissamment avec notre temps qu’ils assurent les explications. En 53 ans, rien (ou si peu) n’a changé. Ce miroir tendu, cruel, désespère car il rappelle aussi qu’en 2025, John Lennon n’est plus là pour protester et prôner que « l’apathie ne sert à rien ». Qui, aujourd’hui, l’a remplacé ?

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Sortie : 11.10.25
De : Kevin Macdonald
Pays : Grande-Bretagne
Durée : 1h41
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