LES 4 FANTASTIQUES : PREMIERS PAS

22/07/2025 - Par Aurélien Allin
En dépit d’une écriture dramaturgique en demi-teinte, LES 4 FANTASTIQUES se révèle joliment incarné grâce à ses acteurs et à ses choix esthétiques.

Joyaux de la couronne du catalogue Marvel, les 4 Fantastiques semblaient condamnés au cinéma à végéter dans des productions indignes de leur statut et ce, même lorsque des audacieux comme Josh Trank essayaient, en vain, de les relire avec une certaine modernité. À la lumière de ce que les héros de Jack Kirby ont connu sur le grand écran jusqu’ici, PREMIERS PAS fait donc office de petit miracle. Sur la Terre 828 – une dimension parallèle à la timeline principale du Marvel Cinematic Universe –, Reed Richards, Sue Storm, son frère Johnny et leur ami Ben Grimm, se sont imposés en « protecteurs du monde » depuis qu’une anomalie cosmique a modifié leur ADN lors d’une sortie dans l’espace. Symboles de paix, de dialogue et de progrès, ils incarnent l’esprit d’années 60 progressistes, futuristes, ouvertes sur l’altérité, fondées sur la science – un monde en forme de contrepoint à l’Amérique actuelle, en somme. Alors que Sue apprend qu’elle est enceinte après des années d’essais infructueux, une menace galactique vient peser sur la survie de la planète… Évitant de conter la genèse des 4 Fantastiques, résumée ici par un reportage de talk-show télé, PREMIERS PAS fait reposer son identité et sa plausibilité sur ses personnages et ses acteurs. Bien lui a pris : Pedro Pascal, Vanessa Kirby, Joseph Quinn et Ebon Moss-Bachrach s’emparent de leur alter-ego avec panache et leur insufflent instantanément humanité, personnalité et crédibilité – alors même que deux d’entre eux, La Torche et La Chose, bénéficient de nœuds dramatiques plus minces. L’alchimie qui les lie, tant dans le trivial d’une scène de dîner que dans les moments de bravoure, symbolise parfaitement ce qui fait la force de ce 4 FANTASTIQUES : l’incarnation. Loin de ce que le MCU avait fini par devenir – des blockbusters numérique dévitalisés, dématérialisés –, PREMIERS PAS fait des choix esthétiques tranchés payants. La direction artistique, très soignée, faite de nombreux décors construits, mais aussi la musique de Michael Giacchino et la photographie de Jess Hall (HOT FUZZ) s’imposent comme vecteurs majeurs de l’assise du film. Alors que Giacchino embrasse avec majesté un lyrisme pop dont il est expert, Hall travaille remarquablement textures, grain et densité des couleurs et rend organiques ces années 60. Presque aussi beau que s’il avait été tourné en 35mm, PREMIERS PAS se fait parfois moins convaincant en mise en scène : sans problème majeur (l’action est généralement lisible, par exemple), le travail du réalisateur Matt Shakman manque néanmoins d’un œil plus marqué, le film manquant cruellement d’images vraiment marquantes ou singulières – à l’exception d’une scène de poursuite spatiale près d’une étoile/trou noir assez remarquable qui hésite toutefois à aller pleinement dans un psychédélisme « à la » Kirby. Si bien que l’on ne peut que se prendre au jeu de cette histoire qui, par sa candeur, son optimisme et son ode à des valeurs de concorde et d’unité, résonne comme en négatif de notre réalité. Là, le spectateur doit souvent faire une partie du chemin lui-même et c’est sans doute là que PREMIERS PAS pèche. Car bien que le récit soit mû par un véritable sens dramaturgique et des enjeux personnels très forts pour les personnages, l’écriture reste souvent en surface et peine à creuser ses thématiques les plus passionnantes – à commencer par la notion de ce qu’un héros doit sacrifier pour le bien commun –, privant ainsi son récit d’une réelle gravité et le spectateur d’un engagement total.

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Sortie : 23.07.25
De : Matt Shakman
Avec : Pedro Pascal, Vanessa Kirby, Joseph Quinn, Ebon Moss-Bachrach
Pays : États-Unis
Durée : 1h55
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