Cannes 2025 : HOMEBOUND

Pour Chandan et Shoaib, c’est un peu à la vie, à la mort. Amis depuis toujours, ils décident de se lancer dans le concours de la police nationale. Pas parce qu’ils sont particulièrement fans de l’autorité, mais parce qu’ils espèrent qu’avec l’uniforme ils auront enfin le droit à un peu de respect. Il faut dire que Chandan est issu d’une caste basse, tandis que Shoaib est musulman dans un pays à grande majorité hindoue, souvent islamophobe. Sauf que dans un pays aussi grand et peuplé que l’Inde, et parce qu’ils habitent une bourgade perdue du nord, les résultats mettent plusieurs mois à arriver et leur situation se dégrade, alors que le Covid pointe le bout de son masque FFP2. Grande fresque superbement filmée qui s’étale sur plusieurs années, mélodrame déchirant sur l’amitié, la fatalité et le déterminisme social, HOMEBOUND de Neeraj Ghaywan est empêché aux entournures par sa volonté de trop bien faire. S’étirant sur deux heures, dont une dernière partie aussi tragique qu’interminable, le film passe son temps à nous expliquer l’injustice que subissent les deux protagonistes, au point de leur faire verbaliser régulièrement, au détour d’un dialogue, que tout est fait pour les enfoncer. Dans son désir d’exhaustivité, le cinéaste semble faire un listing des situations abusives d’une société indienne encore très attachée à la hiérarchie arbitraire des castes et son conflit avec le Pakistan musulman d’à-côté (ce qui malheureusement résonne fort en ce moment). Au bout du compte, il finit par empêcher le spectateur de générer sa propre émotion, puisqu’on lui dit toutes les trois minutes ce qu’il faut penser et ressentir. C’est d’autant plus frustrant que les deux comédiens principaux Vishal Jethwa et Ishaan Khatter ont une alchimie parfaite et se démènent pour donner corps à ces personnages qui sont avant tout des véhicules didactiques. Une déception.