Cannes 2024 : VIÊT AND NAM

24/09/2024 - Par Aurélien Allin
En dépit d’un sujet très fort, ce premier long-métrage se perd dans une formule apathique qui met tout à distance.

Tout débute sur une ambiance amniotique, une image étrange, dont on capte les contours progressivement : de minuscules particules blanches tombent lentement, sur fond noir. Une silhouette, très partiellement éclairée, se fait jour dans l’obscurité : un homme en porte un autre sur ses épaules. On n’en saura pas plus, l’instant étant immédiatement interrompu par le générique. Passé cette introduction mystérieusement évocatrice, tout commence à dérailler dans VIET AND NAM, premier long métrage du cinéaste vietnamien Minh Quy Truong. Il y a bien ces extraits d’annonces télévisuelles cotonneuses, presque désincarnées, durant lesquelles on égrène les noms de soldats morts pendant la guerre du Vietnam, afin de recueillir des informations pouvant mener à la découverte de leurs dépouilles. Mais au-delà, le film va vite s’enfermer dans une formule un peu toute faite, souvent vue et déclinée à l’infini dans le jeune cinéma d’auteur de festival – si l’on doit catégoriser un peu bêtement les choses. Ce ne sont pas tant les plans longs sans coupe – parfois interrompus par de lents mouvements de la caméra sur son axe – les responsables, qu’un traitement narratif désespérément apathique, où chaque dialogue joué sur un ton monocorde est séparé du suivant par plusieurs secondes. Une mécanique extrêmement artificielle qui, très rapidement, met tout à distance, d’autant que le cinéaste étire également inutilement ses plans, lors de scènes dont on peine parfois à saisir l’utilité – que ce soit pour le récit, pour l’atmosphère ou pour l’appréhension de l’univers qu’il déploie. Si bien que, même lorsque VIET AND NAM est parcouru de sentiments censément tempétueux – le désir, le deuil, la peur de l’exil –, il demeure sur cette même note monotone et stérile, dont rien ne dépasse. Pourtant, VIET AND NAM est parcouru d’idées, comme dans cette séquence où le passé d’un lieu, qui fut fossé rempli de cadavres, est superposé à son présent, désormais rue en terre où jouent des enfants. Mais au-delà de la présentation de l’idée, Minh Quy Truong ne la laisse jamais s’épanouir et muter en émotion. Le film court après divers lièvres narratifs en même temps : une storyline sur l’histoire d’amour de deux ouvriers d’une mine de charbon, celle où l’un d’eux cherche la dépouille de son père mort durant la guerre, l’exil planifié des deux à l’étranger pour trouver une vie meilleure. Un trop-plein qui, en dépit de la durée du film (2h10), les laisse tous en suspens, et empêche chacun d’être pleinement exploré. Des sujets indéniablement forts – en témoigne la dernière scène, elle très puissante – qui pâtissent de leur traitement.

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Sortie : 25.09.24
Réalisateur : Minh Quy Truong
Avec : Viet Tung Le, Thi Nga Nguyen, Thanh Hai Pham
Pays : Vietnam
Durée : 2h09
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