BEATLES ‘64
Après McCARTNEY 3, 2, 1 et GET BACK en 2021, puis la résurrection de LET IT BE en mai dernier, Disney+ continue son remarquable travail de curation autour de l’œuvre des Beatles. Après Frank Marshall et Peter Jackson, la plateforme s’adjoint cette fois le concours de Martin Scorsese qui, via sa société Sikelia, produit ce documentaire réalisé par David Tedeschi. Si BEATLES ’64 marque son passage à la réalisation, Tedeschi n’a rien d’un débutant : il a été le monteur de Scorsese sur divers documentaires musicaux, de son segment de THE BLUES au très recommandable ROLLING THUNDER REVUE sur Bob Dylan en passant par le non moins formidable LIVING IN THE MATERIAL WORLD consacré à George Harrison. Un pédigrée qui a son importance puisque Tedeschi doit ici se dépatouiller et remonter un matériau déjà mythique : les images filmées par Albert et David Maysles lors de la première venue des Beatles aux États-Unis au début 1964. BEATLES ’64 a beau se targuer d’en présenter une quinzaine de minutes inédites, quiconque ayant déjà vu WHAT’S HAPPENING ! THE BEATLES IN THE USA des frères Maysles – ou la version remontée de 1991 THE FIRST US VIST –, ne découvrira donc pas grand-chose dans les images d’époque proposées ici. Pourtant ce document tourné au plus près du groupe alors qu’il surfe sur le toit du monde et au cœur du tourbillon qu’il crée, auprès des fans, reste d’une puissance inaltérable. Ces images reconnectent le spectateur à sa propre découverte de la musique des Beatles, cet élan de liberté absolue engendré par une pop lumineuse, généreuse, d’une élégance unique. Certains penseront même, amusés et attendris, à la manière dont Robert Zemeckis et Bob Gale avaient reconstitué ces quelques jours dans CRAZY DAY. Mais BEATLES ’64 va finalement au-delà de toute stase nostalgique : le documentaire ne joue pas forcément la carte de la pédagogie sur le contexte qui emmène les Beatles à cette première visite des États-Unis, mais il propose des angles de réflexion passionnants – la Beatlemania comme une réponse au désespoir généré par l’assassinat de JFK – et extrêmement pertinents – les Beatles comme vecteurs d’une déconstruction de la virilité et de la masculinité typique. Là, BEATLES ’64 atteint son plein potentiel, en se servant d’images iconiques comme rappel de la modernité inépuisable de ce groupe qui, soixante après, s’il a eu des équivalents commerciaux (Taylor Swift, BTS…), n’a connu aucun réel équivalent tant en termes d’impact artistique que socioculturel. Une évidence lorsque l’un des intervenants, se souvenant de sa découverte des Beatles, fond presque immédiatement en larmes, témoignage d’un séisme dont les répliques ne cessent de résonner aujourd’hui.
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Réalisateur : David Tedeschi
Pays : États-Unis
Durée : 1h46