CRASSE

Quand les cinéastes britanniques s’emparent du cinéma social qui a fait la renommée de leur pays pour l’emmener ailleurs, on apprécie car ça se faisait rare. Coup sur coup, on découvre le BIRD d’Andrea Arnold, magnifique envolée vers le réalisme magique d’une adolescence à ras du bitume, et un premier film, sorti chez lui en 2023, CRASSE. Avec l’aide de l’actrice Hayley Squires, révélée par MOI, DANIEL BLAKE de Ken Loach, Luna Carmoon établit d’abord un univers terre-à-terre de foyer déficient. Cynthia, sujette à un sévère syndrome de Diogène, élève sa fille dans une vraie décharge. Mais elle offre au quotidien à Maria, 7 ans, des échappées vers les contes de fées : des loupiottes, des habits roses, des histoires… aussi macabres soient-elles. Quand cette hygiène de vie provoque un accident, les services sociaux placent Maria chez Michelle. Dix ans plus tard, elle vit, sagement, dans cette maison bien ordonnée comme si rien ne s’était jamais passé. Mais le retour momentané de Michael (Joseph Quinn), ancien garçon placé, chez Michelle va réveiller chez Maria des souvenirs qu’aucun déni ne saurait effacer. Leur rencontre, leur amitié, filmées, chorégraphiées à la manière tambourinante d’une danse contemporaine, sont épuisantes. Tout éreinte dans ce cinéma de cris et de fureur jusqu’à une toute dernière partie très belle à la douceur bienvenue.